Red Dead Redemption

[cé]

Une fois n'est pas coutume, je voulais partager mon enthousiasme pour autre chose qu'un film d'animation. Mouais... gardez vos sarcasmes, je l'affirme dès que je le peux, le domaine vidéo-ludique a son lot de chefs-d'oeuvres et de réalisations magistrales. D'autant qu'on n'est pas loin du domaine du cinéma d'animation qui est l'objet principal de ce forum : design de personnage, décors, animation (motion capture et image par image)...
D'habitude très hermétique aux productions de Rockstar spécialiste des simulations de gangsters amorales (LA Noire et les célèbres GTA), je me suis laissé tenter par Red Dead Redemption, sorti en mai 2010 sur XBox360 et PS3. On trouve ce jeu en occasion à des tarifs très abordables (autours de 25 euros), son univers Western m'a semblé mieux convenir à mes goûts et je voulais tester ce que beaucoup tiennent comme une forme majeure du jeu vidéo pour adulte.



Et je me suis laissé emporter par l'histoire et l'univers d'une incroyable densité proposé par l'éditeur américain.

Dans ce jeu on dirige John Marston, gangster repenti dont la famille s'est faite kidnapper par les agents fédéraux pour le forcer à aller régler leurs comptes à ses anciens camarades. Mais on n'apprend cela qu'au cours de l'aventure, le jeu commence simplement après un voyage en train, le cowboy va voir un de ses anciens potes réfugié dans un fort et se fait abattre...
Le jeu ne recommence qu'après la remise de sa blessure, l'ex gangster va devoir rendre des services, gagner un peu d'argent, réapprendre à travailler ou à voler selon l'inclinaison que vous voulez donner à votre personnage. D'abord salarié d'un ranch, Marston va chasser les primes, capturer des bandits, rendre des services, trouver des plantes, chasser et revendre des peaux, faire des rencontres.. On en apprendra plus sur lui au fur et à mesure qu'il se confiera aux personnages qu'il rencontrera sur un territoire peuplé de ranchs, de villes plus ou moins développées, on traversera la frontière pour passer au Mexique et se joindre à des révolutions aux idéologies socialistes, on y croise les premières voitures, le cinématographe, le chemin de fer...



Censée se passer en 1911 dans une contrée reculée des States, inspirées du Texas, du Mexique, du Colorado et de l'Oklahoma, le jeu est une extraordinaire collection de paysages, de végétation et d'une faune documentées. On prend son pied à se déplacer à cheval à pied, en cariole ou en train dans les paysages, sortir des sentiers, dans les plaines arides pleines de cactus pour chasser le tatou ou dans les montagnes enneigées où dépecer le grizzly, attaqué par des meutes de loups ou des embuscades de bandits, avec une gestion de la météo superbe (orages, pluies.. avec des flaques après !), des ciels nuageux et des couchers de soleils superbes (une journée dure environ une heure en sachant que dès qu'on dort quelque part on passe six heures d'un coup).



L'histoire est aussi intéressante, pas simpliste ni manichéenne, chaque personnage ayant sa part d'ombre. Néanmoins l'ambiance générale est quand même sacrément noire et pessimiste sur le genre humain, toujours la proie des éléments, peu de personnages droits et honnêtes mais une flopée de salauds, veules, hypocrites, manipulateurs... tout y passe jusqu'au cannibalisme et à la nécrophilie d'autant que le joueur n'a pas toujours les moyens malgré sa bonne volonté de résoudre une mission sans faire parler la poudre. En gros la méthode de la balle dans la tête est souvent la plus simple façon d'avancer dans l'histoire.



Bref.
Après une quinzaine d'heures de jeu j'étais hyper enthousiaste sur ce jeu, après 26 heures je le suis un peu moins mais encore beaucoup, en tous cas suffisamment pour le communiquer ici. On a l'impression de naviguer dans un western mature, une sorte de Sergio Leone-dont-vous-êtes-le-héros, riche, dense.
Se balader à cheval dans cette nature intacte, sans trace de civilisation, avec une faune généreuse, tuer des pelotons d'espèces protégées (rien qu'en une session de jeu j'ai tiré cinq aigles royaux... juste pour leur piquer des plumes... hiar hiark), dépecer des moufettes ou des castors pour en revendre la peau et la viande, courir avec les étalons sauvages, les cerfs, cueillir des figues de barbarie, ça restera les souvenirs les plus intenses de ce jeu atypique.

Bon c'est vrai que je trouve que le jeu est un peu long, d'autant que quand vous avez eu le dernier grand méchant ça n'est pas encore finit, il vous faut encore retourner chez vous, retrouver votre famille, acheter du bétail, éloigner les corbeaux de vos récoltes, éduquer votre fils... j'en suis aux dernières missions et je trouve ça assez longuets. Surtout que tous les clichés du genre western sont bien présents, duels, poker, charlatans à elixir, pionniers déçus, alcool, prostitution, révolution mexicaine, bateaux à aube, rails sur la prairie, indiens revanchards, soldats autoritaires... on a tout Leone et Lucky Luke réunis
Mais l'exploration du terrain, la recherche des personnages secondaires, les mini jeux (du poker au lancer de fer à cheval), c'est en soi tout un monde.

Un grand jeu, stylé, au graphismes superbes, à réserver à un public averti (le jeu est déconseillé aux moins de 18 ans).

A noter pour l'anecdote qu'il y a dans le territoire deux salles de cinéma où on peut voir deux courts métrages d'animation au look vintage en noir et blanc, un sur un charlatan qui vend des élixirs et un autre sur les suffragettes, pas toujours du meilleur goût.

Deux vidéos pour finir.






+
c

[Kiwi]

Je profite de ce post pour rebondir sur Rockstar et en particulier sur LA Noire.
Bien qu'on soit habitués par cet éditeur à être plongés dans des univers parfois un peu douteux - rapport à la série GTA, j'en conviens, quoique n'oublions pas qu'il s'agit d'un support vidéo-ludique comme un film, donc on parle bien de 'fiction' - il me semble que LA Noire soit un peu différent, plus posé.

En résumé, le joueur incarne l'agent du LAPD Cole Phelps tourmenté par son passé d'ancien soldat, en passe d'obtenir son grade de detective. On est en 1947 à Los Angeles, et le tour de force de l'éditeur est bien évidemment d'avoir retranscrit dans une carte immense, l'univers américain post-WW2 en pleine affaire du Dahlia Noir… avis aux amateurs de James Ellroy.
Sans dévoiler l'histoire, je dirais que malgré des graphismes assez époustouflants, de superbes décors et lumières, une musique soignée, le scénario n'est pas tellement à la hauteur du reste, et on reste malgré tout sur sa faim en termes d'histoire.





Pour en revenir à Rockstar, j'ai trouvé que ce jeu n'était pas particulièrement tendre envers les femmes (et forcément ça n'est pas étonnant quand on pense à leurs autres éditions), qu'on se situe dans les différentes intrigues ou même qu'on parle des personnages principaux - les victimes sont très souvent des femmes avec mutilations mulitples, et aucun des rares personnages féminins ne ressort vraiment par son caractère ou sa présence. Mais je n'ai pas trouvé ça tellement choquant non plus quand on réfléchit à l'époque à laquelle l'histoire est censée se dérouler - l'affaire du Dahlia Noir, encore une fois… On voit très bien la familiarité avec LA Confidential et toute la brutalité que l'intrigue contient, envers les femmes ou envers les hommes.

A la décharge de Rockstar, sa réputation d'éditeur de jeux aux relents un peu sulfureux en prend en léger coup tout de même avec cet opus, puisqu'on incarne une forme de "droiture" au sein d'un LAPD gangréné par la corruption - encore que cet aspect '"flics que tout oppose" aurait pu être tellement plus développé…
De même que Red Dead Redemption, ce jeu propose des balades dans un univers 'ouvert' - on prend un vrai plaisir à se promener dans des décors de cinéma, sous la pluie, visiter des monuments, flâner dans des quartiers entiers en construction… les graphismes sont particulièrement soignés, on s'amuse à visiter les intérieurs, regarder le mobilier entre deux interrogatoires parfois un peu musclés - le jeu est également classé + 18. Et surtout, on se prend vraiment au jeu de l'enquête, : rassembler des preuves, lister des informations et les ressortir aux bons moments durant les phases d'interrogatoires.

Bref, un autre jeu "Rockstar-du-moment", également pour adultes, hautement recommandable à mon avis (Cédric, je n'ai pas lu ton post sur Red Dead Redemption car je vais y jouer aussi ^^)


Voilà, sortez vos manettes, rentrez les sarcasmes , profitons de la météo.

PS : ah, on me signale dans l'oreillette que LA Noire est à l'origine un jeu de l'équipe TeamBondi, qui a été repris puis édité par Rockstar - TeamBondi a même failli être racheté par Rockstar. LA Noire n'est donc pas un jeu 'Rockstar pur jus', au contraire de Red Dead Redemption et autres GTA.

[YuHirà]

Ce "Red Dead Redemption" m'a toujours donné très envie! Malheureusement je ne pense pas que mon ordinateur puisse tenir la cadence! J'avais vu un reportage très intéressant sur la musique de ce jeu, visiblement très fignolée!

Comme Kiwi, j'en profite également pour rebondir sur Rockstar en évoquant un jeu que tu n'as pas cité, qu'ils n'ont pas produit au départ mais qu'ils ont d'abord distribué sur console avant de produire les deux volets qui ont suivi: la saga Max Payne.

Je n'ai pas une grande expertise dans ce domaine (loin de là) mais c'est en jouant à ce jeu - effectivement très noir - que j'ai compris que le jeu vidéo pouvait être une oeuvre d'art. Le scénario est plutôt bien pensé (avec une une voix off à la première personne qui permet au joueur de s'identifier encore plus à la psychologie de cet être tourmenté par l'assassinat de sa famille), le gameplay est jouissif (cf. l'effet bullet time), mais surtout, les développeurs n'hésitent pas à partir dans des choses très expérimentales, comme cette séquence où on déambule longuement dans des cauchemars particulièrement abstraits. Je n'ai retrouvé ce goût du risque qu'avec Machinarium, qui, d'ailleurs, ravira sans doute les amateurs d'animation que vous êtes.

[cé]

Red Dead n 'est pas encore dispo sur PC donc pas de config' spéciale à avoir
C'est vrai que j'ai oublié de parler de la musique qui est très intéressante : comme dans pas mal de ces jeux c'est une musique contextuelle et comportementale, avec des boucles qui se répètent, différentes selon les territoires : notes d'harmonica et de banjo au Texas et trompettes bouchée et marracas au Mexique par exemple. Les scènes intenses, fusillades, courses poursuites, ont leur thèmes propres, c'est de la belle ouvrage, comme le reste.
J'ai omis aussi de parler des voix, non doublées, très chouette, sans pour autant être phagocytée par de grands acteurs... Seule ombre, le sous titrage sur une télé SD c'est à la limite de la lisibilité. J'ai regretté d'ailleurs de ne pas le jouer en HD...

Merci kiwi pour la chronique sur LA Noire, ça donne effectivement envie, ne serait-ce que pour découvrir une ville à une époque donnée, c'est une belle immersion historico-politique. Après je suis un peu gêné par le caractère systématiquement sombre et la surenchère dans le sordide. Il serait intéressant de voir dans quelles proportions et avec quelle fréquence un flic de cette époque était confronté à des délits types carnages, découpages, éventrements, fusillades, etc... je ne suis pas sur que ça ait été si fréquent. Après c'est sur que c'est un jeu et qu'il faut maintenir l'attention du joueur. Je ne pense pas que la simple simulation attire les joueurs.

Quant à Machinarium, il avait eu les honneurs d'une news, comme Samorost en son temps

http://www.fousdanim.org/index.php?sear ... ta&x=0&y=0

+
c

[YuHirà]

Red Dead n 'est pas encore dispo sur PC donc pas de config' spéciale à avoir

Ah zut je n'avais même pas fait attention, persuadé que j'étais que ma config ne suivrait pas de toute façon

Mais quelque part ma remarque reste encore plus vraie du coup

Et comme je n'ai ni console ni téléviseur, je vais devoir attendre, snif

Quant à Machinarium, il avait eu les honneurs d'une news, comme Samorost en son temps

Autant/Au temps (je ne sais jamais) pour moi!

[cé]

merci pour le docu sur la musique, très intéressant !
un vrai challenge la musique de jeu vidéo.
+
c

[Lamartine]

Voilà qui donne sacrement faim, merci pour vos retours ! Je pense craquer pour ces deux jeux à la rentrée. J'en profite pour faire part de mon impatience quant à la sortie de la suite des deux premiers opus de Bioshock. Ces derniers justifient à eux seuls l'achat d'une console

[Jules.B]

Pas pour moi je pence plutôt que sa plaira à énormément de gens dans le monde.
merci pour le lien

PS:craque Lamartine craque !

[Azertyy]

Voilà, merci à tous j'ai craqué ce dimanche, résultat une ps3 et red dead et quelques euro de moins

[cé]

Oups.
J'espère que tu ne seras pas déçu

[Kiwi]

Après je suis un peu gêné par le caractère systématiquement sombre et la surenchère dans le sordide. Il serait intéressant de voir dans quelles proportions et avec quelle fréquence un flic de cette époque était confronté à des délits types carnages, découpages, éventrements, fusillades, etc... je ne suis pas sur que ça ait été si fréquent. Après c'est sur que c'est un jeu et qu'il faut maintenir l'attention du joueur. Je ne pense pas que la simple simulation attire les joueurs

Je serais plutôt du même avis que toi là-dessus Cé, du coup ma réponse risque de faire un peu doublon, mais je souhaite quand même te répondre au sujet de LA Noire sans trop dévoiler de détails.
Par rapport aux enquêtes proprement dites, il n'y a pas tellement de détails dans les carnages ou même d'éviscérations en tous genres… on assiste le plus souvent aux résultats d'un méfait.

Il me semble que c'est plutôt dans la partie "quêtes annexes" du scénario que, oui, en effet, les courses-poursuites sont quasi systématiquement suivies de fusillades… et avec mon complice Cheval, on s'était fait justement cette remarque : "ben mince, ils arrêtent les types, descendent encore toute la bande de malfrats et puis… ben rien." Les quêtes annexes sont très agréables à entamer - c'est court, y'a du suspense, la musique s'emballe - mais ne développent pas plus le scénario et c'est bien dommage.

Pour en revenir à la violence décrite par rapport à la description de l'époque, j'imagine aussi que les detectives n'étaient sûrement pas plongés dans des affaires de moeurs, de trafics ou de crimes aussi sordides. On pourrait se poser la même question qu'il s'agisse d'un film, d'un roman ou d'une série télé d'ailleurs. Encore une fois, l'influence principale de l'univers de LA Noire est à mon avis le roman noir/film noir, dans lequel les personnages principaux sont confrontés à un quotidien toujours plus sombre et à un destin tortueux forcément tragique - on n'est pas dans le réalisme, sauf ici pour les décors, le mobilier, ou les véhicules.

C'est sûr qu'il faut bien attirer le chaland et surtout le maintenir éveillé, pour l'amener aussi à acheter des enquêtes supplémentaires… donc une "simple" simulation ne résisterait pas longtemps face aux blockbusters du genre (et pourtant, j'aurais adoré pouvoir me promener dans les décors et dénicher plus d'interactions avec ceux-ci, ça renforce le sentiment d'immersion)

Allez, (res-)sortons les manettes ^^
Il y a aussi tout un tas de très bons/très jolis jeux également en support téléchargeable.